Pascal (1623-1662)

Pascal (1623-1662)

Nous avons vu ce matin que lorsque la pensée s'attache à l'homme dans ce qu'il a d'universel, elle s'attache à caractériser la condition humaine : nous sommes mortels, soumis au temps, à la maladie, à la vieillesse. Jetés dans un monde que nous ne choisissons pas, nous sommes en sursis dès notre naissance(nous sommes des "êtres-pour-la-mort" selon Heidegger) - et la question était de savoir ce qu'il nous revient de faire face à ce qui se manifeste dans l'existence comme de l'angoisse, ce sentiment que nous éprouvons face a néant, que tous les hommes ne sont pas prêts à l'assumer.

La plupart se porte vers ce que Pascal nomme le divertissement : pour échapper à la pensée de notre finitude, pour se détourner de cette méditation, nous nous portons vers "le jeu et la conversation des femmes, la guerre, les grands emplois" (Pensées, 139). Et, souvent, nous sommes dupes de ces activités qui ne sont en fait que l'illusion du bonheur, qui ne valent que parce qu'elles sont agitation.

La question a été posée de savoir, dès lors, ce qu'est le bonheur selon Pascal ce qui outrepassait le cadre de notre réflexion, qui pour l'heure s'attache simplement à déterminer en quoi il est légitime de dire que la pensée fait obstacle au bonheur.

En premier lieu, la critique du divertissement vise à ne pas confondre le plaisir, passager, qui occupe l'esprit et les sens, et le bonheur. La chose vous apparaîtra sans doutes plus nettement avec une illustration :

D'où vient que cet homme, qui a perdu depuis peu de mois son fils unique et qui accablé de procès et de querelles était ce matin si troublé, n'y pense plus maintenant? Ne vous en étonnez pas, il est tout occupé à voir par où passera ce sanglier que les chiens poursuivent avec tant d'ardeur depuis six heures. Il n'en faut pas davantage. L'homme, quelque plein de tristesse qu'il soit, si on peut gagner sur lui de le faire entrer en quelque divertissement, le voilà heureux pendant ce temps-là.

L'homme prend pour le bonheur une ombre de bonheur, pour se détourner du grand chagrin qui l'accable. Il pense encore, mais il pense à des chimères. En un certain sens, Pascal pointe une double perte : non seulement nous nous faisons ainsi une fausse idée du bonheur, mais nous appliquons notre pensée à des objets vains.

Le bonheur réel, selon Pascal, est celui de l'homme qui ne s'attache pas aux vanités du monde, parce qu'il a saisi qu'il est prisonnier de sa condition de misère. Dès lors, c'est vers Dieu qu'il se tourne : le bonheur est en Dieu, dans sa contemplation et sa rencontre, par l'intermédiaire de ce qu'il nomme le coeur, instance distincte de la raison. Ce qui nous promet le bonheur, c'est la foi.

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